CAP 2022 : le ministre confirme les menaces sur la DGFiP

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Selon le calendrier annoncé du gouvernement, nous devrions déjà avoir eu les annonces de CAP 2022 et de la réforme des retraites.

Alors que la réforme des retraites est d’ores et déjà largement réfléchie par le gouvernement et que le rapport CAP 22 est terminé et dans les mains du premier ministre, les annonces sont repoussées à « des dates ultérieures ».

Alors que la puissante grève des cheminots se poursuit et que l’exécutif s’efforce de briser la mobilisation des étudiants, il est évident que le gouvernement joue la montre pour éviter d’ouvrir d’autres fronts dans la période et risquer une convergence des luttes des salariés.

Cependant, des rencontres bilatérales du 4 mai entre le ministre Darmanin et les organisations syndicales des finances, il ressort que les grandes pistes de réformes précédemment annoncées par le Directeur général sont bel et bien maintenues.

Le ministre a annoncé que le rapport sera présenté à la fin du mois de mai... une phase de « dialogue » aura lieu dans chaque ministère. Fin juin, les propositions retenues seront connues. Il a cependant été en mesure de faire un point sur les mesures en débat pour la DGFiP.

- La fin de la TH : « Il sera nécessaire de redéployer les agents ou de supprimer les emplois, mais il est aussi nécessaire de revoir les bases de la valeur locative de la Taxe Foncière. »

PAS : s’il a reculé d’un an le déploiement, c’est notamment car il a « écouté » les organisations syndicales dont la CGT. Mais aujourd’hui, selon le ministre, il serait inutile de créer de l’inquiétude en plus ! « Il est important que cette réforme fonctionne pour toute la DGFiP ». Il reste prêt à écouter les points techniques qui pourraient continuer à poser problèmes.

Recouvrement : le gouvernement travaille à un seul réseau sur la partie cotisations sociales : AGIRC/ARCCO/URSAFF. Il y a aussi la volonté d’un seul réseau côté fiscal qui serait la DGFiP car à terme, « il ne faut pas de taxes qui ne rapportent pas à minima 150 000 millions d’euros. »

- Séparation ordonnateur comptable : La proposition serait de mettre en place une dizaine d’agences pour les très grandes collectivités. L’expérimentation aura lieu entre 2019 et 2020, en travaillant avec l’association des grandes collectivités.

Proximité : Sa proposition est dune trésorerie par intercommunalité. En parallèle, l’état s’engagera à ce que les agents qui font de la fiscalité soient présents 5 à 6 fois par an dans les collectivités où il y a aujourd’hui présence d’une trésorerie (Il n’a pas précisé les contours de cette présence).

- Emploi : Aujourd’hui la DGFiP ne sait pas à quelle sauce elle sera mangée... car après définition des missions, les volumes de suppressions d’emploi sont calibrés années par années... C’est donc, selon le ministre, à la fin du quinquennat que pourra être fait un point pérenne sur les moyens qui sont à la disposition de la DGFIP, pour une autonomie complète de gestion. A ses yeux, le processus global devrait être décidé sur la fin de l’année 2019. Il n’y a donc pas de doute : la DGFiP va continuer de perdre des milliers d’emplois jusqu’en 2022.

- Contrôle fiscal : Pour lui, évidemment, la loi sur le droit à l’erreur (ESSOC) n’amoindrit pas le contrôle, mission renforcée à ses yeux par la loi proposée sur le contrôle fiscal. De plus, « il y a un intérêt collectif à ne pas être démagogue et à garder à ce jour le verrou de Bercy, même si évidemment il faut améliorer les circuits. »

- Gestion du personnel : Selon ses dires, les préfets ne récupéreront pas la tutelle des agents des finances publiques, mais son directeur de cabinet semblait moins affirmatif.

- Niches fiscales : dans CAP 2022, il y a une réflexion sur la suppression de... à hauteur de 10 milliards d’euros. Pas plus de précisions.

Ces pistes viennent compléter celles du Directeur Général annoncées le 9 mars 2018 :

  • fin de la possibilité de payer en numéraire au guichet. Cette responsabilité serait transférée à La Poste, société qui propose déjà une prestation commerciale payante d’aide à la télédéclaration pour 50 euros.

  • Transferts de missions cadastrales vers l’Institut Géographique National.

  • Domaine : création d’une agence foncière pour gérer les biens atypiques de l’Etat

  • Sortie des HLM de la comptabilité publique

  • Menace sur la pérennité des SIP sous 10 ans en raison de la mise en place du PAS et de la fin de la TH.

  • Développement de services à compétences supradépartementales et créations de directions multidépartementales : le bruit court déjà que la DDFiP de l’Ardèche est concernée et deux des neuf DISI disparaîtraient au plus tard le 1er janvier 2019, entraînant le changement de directions de rattachement de nombreux établissements.

  • Ce mouvement de concentration colle à celles déjà lancées par la DGFiP elle-même, notamment l’objectif d’un SPF par département en 2020 inscrit dans l’instruction du 2 mars 2018.

Demain, tous précaires ?

La DGFiP remet déjà en cause les règles de gestion des personnels en mettant fin à la garantie de maintien à la résidence en cas de suppressions d’emplois ou de transfert de missions. Elle s'inscrit ainsi dans la droite ligne d’un gouvernement qui entend dans l’immédiat mettre à mal le statut général des fonctionnaires en prévoyant de renforcer le recours au recrutement contractuel dans l’administration dans le cadre de CAP 2022.

Les préconisations du Comité action publique 2022 auprès du gouvernement ont fuité dans les colonnes de Libération, le 16 mai : « Des profs avec un CDD de cinq ans, des policiers embauchés pour seulement dix ans, des agents en contrats de deux ou trois ans renouvelables… Voici le nouveau monde des fonctionnaires imaginé par les experts du comité. »

Si ces propositions doivent encore faire l’objet d’arbitrages gouvernementaux, le Secrétaire d’Etat Olivier Dussopt vient d’ouvrir un cycle de travail sur « l’extension du recours au contrat dans la fonction publique » avec pour objectif « d’accorder plus de souplesse et de liberté aux employeurs publics pour recruter leurs équipes en leur permettant de recourir d’avantage au contrat ».

Ces annonces tombent alors que la DGFiP a mis en place en 2017 des grilles de rémunérations propres à ses agents contractuels sur la base d’une logique simple : les payer moins que les fonctionnaires alors qu’ils ne bénéficient déjà pas des mêmes garanties. En effet, les grilles sont similaires à celles des fonctionnaires mais comptent en moyenne 4 points d’indice en moins par échelon.

Pour la CGT, aucune des pistes évoquées n’est admissible. Elles sont toutes dans une logique de dépeçage de la DGFiP et s’inscrivent dans la mise à mal de nos statuts (général et particuliers) et la précarisation des personnels.

C’est pourquoi, aujourd’hui, la mobilisation est plus que jamais nécessaire.

Cela passe par la grève, par la tenue partout d’Assemblées Générales, de réunions sous toutes les formes pour définir ensemble les revendications, les actions concrètes à mener et travailler ensemble à la mobilisation du plus grand nombre.