Conseil Supérieur de la fonction publique du 10 juillet 2018 : La comptabilité publique sous la coupe de CAP2022

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A l’ordre du jour de ce conseil supérieur, un projet de décret modifiant le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.

Le projet s’inscrit dans le cadre d’« Action publique 2022 » et des suites du Comité Interministériel de la Transformation ubliqueP du 1er février 2018 visant notamment « à une plus grande responsabilisation des managers publics ».

Les principaux amendements sont les suivants :

  • Suppression d’une comptabilité spécifique à l’État portant sur l’analyse des coûts ;
  • Suppression du contrôle de légalité des actes de personnel exercé par les contrôleurs budgétaires dans un objectif de responsabilisation des gestionnaires ;
  • Modulation des contrôles exercés par les contrôleurs budgétaires au regard des dispositifs de contrôle interne budgétaire et des résultats de leurs propres contrôles. Il s’agit de favoriser l’émergence d’un dispositif de contrôle qui pourrait être modulé (dans son périmètre et sa périodicité) sur proposition des contrôleurs budgétaires, en fonction de la maturité du dispositif de contrôle interne budgétaire des ministères ou des organismes, de son évaluation des risques, ainsi que des résultats des contrôles a priori et a posteriori réalisés notamment sur la qualité et la sincérité de la programmation budgétaire.;
  • Modulation des contrôles exercés par l’ordonnateur sur la conformité quantitative et qualitative du service fait ; On passe d’une logique de contrôle unitaire systématique à une logique de contrôle systémique intégrant l’ensemble de la chaîne de la dépense.
  • Suppression du contrôle règlementaire préalable des comptables publics sur le respect des règles relatives au contrôle budgétaire.

Le texte prévoit des modifications des règles applicables à certaines personnes morales ainsi que des expérimentations. Pour une durée de quatre ans, diverses expérimentations seront menées dans différents domaines.

Il s'agira de permettre d’expérimenter un document de programmation unique, des évolutions du document de répartition initiale des crédits et des emplois, un assouplissement, voire une suppression du schéma d’emploi et, selon les documents budgétaires, le passage de visa du contrôleur budgétaire en avis ou réciproquement.

De plus, il s'agira d’expérimenter une modulation de l’exercice de la tutelle en fonction des enjeux ou une délégation de son exercice. Enfin, l’expérimentation pourra porter sur un rapprochement entre centres de services partagés et services facturiers.

La CGT s’est exprimée contre le texte.

Lors de la refonte du décret GBCP en 2012, nous avions formulé de vives critiques sur un texte qui offrait une double lecture, en réaffirmant certains principes d'une part, mais en transformant la comptabilité publique dans une logique d'adaptation juridique permettant d'accompagner les évolutions politiques de transformation de la fonction publique d'Etat, et les modifications qui sont apportées aujourd'hui obéissent aux mêmes logiques.

En effet, même si certaines dispositions relèvent d’une simple mise à jour, la philosophie générale du texte qui allège considérablement le rôle des comptables publics, voire la disparition de la séparation de l’ordonnateur et du comptable conduit à une prise de risques sur l’utilisation des fonds publics qui peut être dangereuse.

Le contexte de présentation de ce texte ne saurait être occulté, ce CSFPE se tenant à la veille d'annonces devant être formulées par Gérald Darmanin sur la réorganisation des ministères économiques et financiers (avec des menaces sur les administrations qui les composent). Qui plus est, il s'agit là avant tout de faciliter les évolutions induites par CAP2022, en permettant des expérimentations dont les contours demeurent flous