Départementalisation de Mayotte : une belle arnaque pour les personnels

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Groupe de travail du 2 mars 2015 : départementalisation de Mayotte

Cette réunion s’est tenue suite à nos demandes répétées d’avoir a minima un point d’information quant à la départementalisation de Mayotte. La CGT Finances Publiques a rappelé que cette évolution institutionnelle avait non seulement été mal réfléchie, mais aussi et surtout mal accompagnée. Ainsi, plusieurs agents voient des droits qu’ils pensaient acquis être remis en cause sans aucun élément d’information ni d’explication. Le sentiment de non préparation atteint son paroxysme lorsque certains sujets non négligeables (indemnitaire notamment) rencontrent des questions d’interprétation des textes aboutissant à une application différenciée selon les administrations.

La départementalisation de Mayotte a eu des incidences notables en matière de droits et garanties des agents. L’absence d’anticipation de certaines mesures a notamment conduit les agents à devoir se positionner pour une prolongation de leur séjour avant la parution du décret modifiant les affectations. Ainsi, alors qu’ils se sont prononcés dans le cadre d’une durée réglementée, certains se sont vus d’office appliquer les nouvelles règles liées à l’absence de limitation du séjour.

Or, aucune information ne leur avait été préalablement donnée quant aux effets de ce changement de régime. Surtout, tous ne sont pas concernés. Selon que la date de renouvellement (qui correspond à la date anniversaire d’installation) tombe avant ou après le 30 juin 2014, les agents ne sont pas traités de la même façon, quand bien même la décision de l’administration de leur accorder ce renouvellement serait antérieure.

Ainsi, pour les renouvellements survenus avant cette date fatidique, les agents sont dans un régime transitoire au décret de 1996. Ils continuent notamment de bénéficier de certaines garanties :
-  Congé administratif de 2 mois accordé en fin de séjour, qui vient en complément des droits à congés annuels ;
-  Prise en charge des frais de changement de résidence à 100% lors de leur retour en métropole ;

Les agents renouvelés ultérieurement eux n’ont pas les mêmes droits, car ils ne sont plus soumis au séjour réglementé :
-  Congé bonifié d’un maximum de 65 jours au bout de 36 mois de service interrompu, avec écrêtement des droits à cognés annuels (conservation des jours ARTT) ;
-  Prise en charge des frais de changement de résidence à 80% lors du retour en métropole.

Ainsi, selon que l’agent ait été affecté au 1er mai 2012, ou au 1er août, il ne dispose pas des mêmes garanties à l’issue de sa prolongation : perte de 32 jours de congés annuels l’année de la prise de congés bonifiés, et perte de 20% des frais pris en charge à son retour. Or, le choix de prolonger s’est effectué dans les deux situations en 2013, soit dans la logique du décret de 1996.

Pour la CGT Finances Publiques, il est nécessaire que l’administration corrige cette situation, qui remet en cause les choix opérés par manque d’information. Si le changement de règlementation engendre ce basculement, il nous semble que des solutions peuvent s’envisager par équité (notamment en prenant en compte la date de la décision administrative de prolongation), et ce d’autant plus que la seule information communiquée aux agents est intervenue début 2015…

Cette question est d’autant plus importante au regard des enjeux liés à l’attractivité de Mayotte. Pourquoi les agents attendraient ils d’arriver au bout des 4 ans alors qu’ils n’ont plus les mêmes garanties ?

A cela se rajoute les questions liées à l’indemnitaire avec notamment le remplacement de l’indemnité d’éloignement par une indemnité « transitoire » (assiette de versement basculée du traitement net au brut, et modification du nombre de mois de traitement versé). La départementalisation a créé une situation ubuesque en prévoyant des incompatibilités entre l’indemnité d’éloignement et la majoration de traitement. Or, tandis que la première est versée en fonction de la date d’installation de l’agent, la seconde dépend elle de l’année civile.

Un flou demeure donc sur la possibilité de verser la majoration de traitement pour les agents dont le renouvellement est intervenu en 2014 : est il ou pas possible d’un cumul au prorata entre l’indemnité d’éloignement versée dans le cadre du décret de 1996 et la majoration de traitement ? Sur cette question, la DGFiP indique avoir saisi le ministère de la Fonction Publique, et reste en attente de réponse.

Dans le même temps, les agents nouvellement affectés sont confrontés à la bascule dans un nouveau système : affectation normalisée dans le cadre des mouvements de mutation. Ils bénéficient également du dispositif transitoire en attendant la mise en place de l’Indemnité de Sujétion Géographique en 2017 (qui sera concomitante de la mise en paiement complète de la majoration de traitement). Mais tous sont désormais confrontés à la fiscalisation de toutes les indemnités. Dans la mesure où il s’agissait pour plusieurs d’entre eux d’un mécanisme couvrant la nécessité d’une double résidence (logement à Mayotte et logement dans le département d’origine), cela remet également en cause l’intérêt d’y rester.

Ainsi, il semblerait que près d’un quart des effectifs actuellement sur place envisagerait un retour dès cette année. En l’absence d’un vivier d’agents « originaires » suffisamment conséquent, on peut s’inquiéter sur le taux de remplacement qui sera alors réalisé. L’administration nous a rassuré quant au fait qu’aucun agent ne serait forcé de rester sur place, ni qu’aucune affectation d’office n’aurait lieu. Pour autant, elle ne nous a donné aucune réponse quant aux moyens qu’elle mettrait en œuvre pour inciter à demander sa mutation.

Le devenir des services à Mayotte devient ainsi inquiétant lorsque l’on met en perspective ces questions avec le climat social. Depuis le groupe de travail du 7 février 2014, la situation s’est nettement détériorée avec une flambée de l’insécurité : cambriolages, trafics de stupéfiant, agressions gratuites... Plusieurs facteurs concourent à cet état de fait, et aujourd’hui personne n’est totalement à l’abri… La DGFiP si elle n’a pas la main sur les questions de sécurité, a cependant certaines responsabilités envers ses agents qu’elle se doit d’assumer.